Justice, justice sociale, mérite, reconnaissance

De Coredem
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Définitions

  • La justice est une évaluation sur la base d'un principe d'égalité ou de proportionnalité de l'équilibre des actions des individus considérées dans leur rapport à la vie de la collectivité. Pour Platon, la justice peut également être considérée comme une vertu, caractérisée par la motivation à faire le bien et la contribution à l'harmonie individuelle et sociale. Il est d'usage depuis Aristote de distinguer (a) la justice commutative qui préside aux contrats et aux échanges et repose sur l'égalité stricte des personnes et sur l'équivalence des choses échangées et (b) la justice distributive qui préside à la répartition des dignités, fonctions et avantages sociaux et repose sur la proportionnalité aux aptitudes et aux mérites personnels de chacun. La justice est en outre une institution judiciaire en charge du réglement des conflits, sur la base d'un code juridique qui s'accompagne d'une interprétation de la loi sous forme de jurisprudence.
  • Les conceptions de la justice sociale contemporaines s'opposent sur la possibilité d'une procédure de justice (courant dit "libertarien") qui resterait neutre à l'égard des traditions substantielles portées par telle ou telle communauté (courant dit "communautarien"). Ainsi, la théorie de la justice de Rawls suggère un modèle de justice sociale procédurale fondé sur les deux principes de liberté et de différence, ce dernier étant à l'origine de ce qu'il est convenu d'appeler la "discrimination positive". Cette conception de la justice comme équité est censée pouvoir s'appliquer à toutes les communautés particulières d'une société, quelles que soient leurs traditions propres. A l'opposé, la conception de la justice promue par Walzer insiste sur l'existence de plusieurs sphères de justice qui sont chacune bien adaptées aux secteurs d'activité et aux traditions morales et religieuses des diverses communautés.
  • Le mérite est la justification commune de la règle proportionnelle de justice reconnaissant une inégalité légitime du fait des contributions différentes des individus. Le mérite est la règle qui permet d'attribuer un bien supérieur à ceux qui ont fourni une contribution supérieure en terme d'effort, de sacrifice ou de travail. Le mérite ne repose donc pas sur l'égalité stricte des parts auxquels ont droit les individus, mais sur une inégalité justifiée par un argument pertinent. Les partisans des deux conceptions égalitaire et inégalitaire s'accordent sur le fait qu'une inégalité qui ne serait pas justifiée par un argument pertinent devrait laisser la place à la règle d'égalité stricte. Ainsi, si une mère doit partager un gâteau entre ses quatre enfants, elle peut justifier l'inégalité des parts au moyen de plusieurs arguments pertinents : le besoin : un des enfants déclare avoir particulièrement faim ; le droit : un des enfants avait obtenu la promesse de la mère d'avoir la moitié du gâteau ; le mérite : un des enfants a travaillé pour la mère ; le statut : un des enfants peut revendiquer une part plus grosse du fait qu'il est l'aîné. Mais le fait qu'un des enfants a de beaux yeux ne constitue pas un argument pertinent pour justifier une inégalité du partage.
  • La reconnaissance est une des formes de la justice sociale qui insiste sur la nécessité de reconnaître l'identité et le développement personnels des individus, au delà de la juste redistribution des biens et des ressources. Pour Honneth, le problème majeur de la justice sociale est de prévenir et d'empêcher les atteintes à la dignité ou les attitudes de mépris et d'humiliation. Une telle position signifie que la dignité et le respect sont des fins prioritaires qu'une société doit se donner pour tâche de réaliser, avant même toute considération d'équité redistributive. Le degré de justice d'une société peut être évalué en fonction de la capacité à garantir les conditions de la reconnaissance mutuelle, lesquelles sont essentielles pour la formation de l'identité personnelle ainsi que pour le développement personnel des individus. De la sorte, l'égalité sociale et l'égalité de traitement consistent dans la possibilité pour tous les membres de la société de construire leur propre identité dans l'interaction sociale avec les autres.

Références

Sylvain Lavelle, Science, technologie et éthique, Ellipses, 2006.

Liens utiles

Site du Centre Ethique Technique et Société (CETS), ICAM de Lille